Step 6: Transatlantique

Compliqué à écrire ! Moins à raconter ! On se dit tout quand on se revoit ?

Bon on va faire un effort !

2100 milles nautiques à parcourir depuis Mindelo, situé à l’ouest du Cap Vert sur l’île de Sao Vicente. Nous avons parcouru à ce moment là depuis La Rochelle quasiment 3000 milles mais répartis sur plusieurs nav’. Notre maximum en mer est de 8 jours entre les Canaries et le Cap Vert et nous prévoyons pour cette traversée 20,8 jours… En gros sur notre planning nous prenons une distance mesurée sur Open CPN, une vitesse moyenne de 5 nœuds et une marge de 15%. Voilà d’où vient la décimale. Nous sommes donc quand même assez confiants sur le fait de faire moins de 20 jours même si il est déjà arrivé à d’autres de faire face à des molles sur plusieurs jours qui rendent fous et qui retardent énormément. Donc la grande traversée nous attend !









Check up du bateau :
  • Derniers petits travaux ok (feux, bout hydro, filets fruits)
  • Pleins d’eau et de gazoil
  • Les pilotes auto ok


Check up de la météo : 
  • Alizés clairement établis : Vent D’Est assez fort au début 25-30 nœuds et mollissant 4 jours après à 15 nœuds. Les flèches ne bougent sur les Grib, on n’a jamais vu ça !
  • Martin au taquet sur son téléphone pour nous donner la météo  après 5 jours de nav sur notre téléphone satellite! Son travail se résumant à sans doute toujours envoyer le même texto : Vent d’Est-20 nœuds-Martin.


Check up de l’équipage :
  • Reposés, on ne va pas faire de faux départ et se faire une marina pendant 2 jours à 10 milles du départ…
  • 4 jours de plongée et un petit mal de crâne qui ne passe pas trop pour moi, mais ca va le faire ! Avec la pharmacie qu’on a, on pourrait soigner tous les équipages de cette transat !

Prêts à faire feu ! Pas comme notre voisin de ponton qui vient d’arriver avec son gréement de fortune. Il avait dû démâter avant d’arriver sur le Cap Vert ! Bon courage à lui, ca faisait assez froid dans le dos de voir dans quel état l’équipage était !

Nous partons donc du Cap Vert le 11/12/14 à 22h00 GMT. Le compteur est lancé ! On va tordre cette transat !!

Alors maintenant comment construire l’article… On pourrait spliter l’article en 3 parties avec : le départ/l’amarinage, la routine, l’arrivée ou encore en 3 autres parties : Coryphène 1, Coryphène 2, Espadon mais cela ne conterait que nos exploits de pêche… Non on va se faire ça en deux parties : Avant l’incident, Après l’incident !

Avant l’incident

11/12/14

C’est parti on relance la machine, quart de nuit pour bibi, Arthur en veille pour ce premier quart de transat. Le départ est assez simple, pas trop de pression, on se dit que ca va être une nav assez simple car réputée pour la stabilité de ses vents. Le classique état nauséeux nous prend dès le départ à cause de la nuit qui nous fait ça à chaque fois. Cela qui rend la première bannette incroyable car elle guérit cet état très vite !

Tout se passe très bien, nous avionnons de plus en plus, nous avalons les journées et les milles sans problème ! Un barème est établi : Journée Cata <60 milles/j ; Mauvaise 60 milles/j ; Moyenne 80 milles/j ; Bonnes 100 milles /j ; T Bonne 120 milles ; Ouf 140 milles ; Œil >160 milles.


Avec le vent soutenu que l’on a eu au début, nous enchainons les journées TB et Ouf avec deux jours de suite à 153 milles par jour ! Nous gagnons du temps sur notre transat, c’est énorme, ça gonfle le moral au maximum ! Cette sensation de s’endormir et de laisser le bateau avancer sous la veille de l’autre est vraiment excellente. Car pendant la journée, nous avons tous les deux toujours les yeux rivés sur la vitesse du vent, du bateau, la direction du vent, la position etc… Lorsque la bannette profonde arrive, on peut tout laisser à l’autre, partir dans sa cabane et dormir profondément pendant que le bateau avance tout seul !

Les quarts de nuit sont très différents les uns des autres, parfois c’est la grande forme, où on en profite pour faire quelques travaux/améliorations (genre toujours ces feux de navigation) et parfois c’est la lutte sans merci contre le sommeil !  Disons que le fait de ne voir personne depuis plusieurs jours nous donne vraiment l’envie de lâcher prise et de ne plus veiller comme il se doit. Dans les cas de grande fatigue, cela peut se traduire parfois par des « siestes » de une heure en « veille »… Le meilleur étant de se faire réveiller par celui qui est en bannette profonde et qui prend son quart naturellement… Et oui… Et puis franchement, on navigue tous dans le même sens, il n’y a pas de cargo car ce n’est pas leur route, ça ne vous est jamais arrivé de vous endormir sur l’autoroute ?

Pendant les quarts de grande forme, la magie de la transat opère réellement ! Seul à la barre, le bimini relevé, le ciel dégagé, des étoiles filantes restant plus de 2 secondes dans le ciel, 6 nœuds de moyenne, et le tout en plein milieu de l’Atlantique !! C’est juste énorme ! Pendant ces instants, beaucoup de personnes et d’idées s’entrechoquent dans votre tête, menant à des réflexions que vous n’avez jamais eu le temps d’achever ou même parfois d’entreprendre ! A tel point qu’il arrive que le quart de veille suivant, après 3 heures de sommeil, on se dise « Hou là je suis allé loin toute à l’heure, n’importe quoi !! ».

Parlons un peu maintenant d’un sujet essentiel à bord que nous attendons 3 fois par jour, voire 4 ! « La Gamelle !!! »
Le plein de frais a été fait à Mindelo, donc l’objectif est de consommer le frais le plus vite possible sans hésiter car dans le bateau, tout pourrit ou moisit assez vite créant des odeurs inconnues jusque là !! Cette leçon prise des autres traversées, il ne faut pas gâcher !! Au pire il est toujours préférable de faire trop à manger car cela se conservera mieux au frais dans des boîtes plastiques. On se donne donc à fond pour nos plats ! La cuisine commence toujours par 3 oignons dans une poêle à réduire et après on voit !

Pessimistes, au départ du Cap Vert nous avions acheté du thon au marché à un prix plutôt onéreux (3 euros le kilo…), car nous n’étions pas sereins sur nos capacités de pêche ! Mais le jour de l’abondance de poisson arriva ! Finis nos doutes sur nos méthodes, finis les « magasins » de fil à mettre comme nous le conseillait un vendeur de La Rochelle (le magasin étant une unité de mesure bien connue dans la pêche…), finie la méthode du crabe au bout de la ligne (désolé Titine), fini le morceau de Knacky sur l’ameçon (désolé Jérôme), finie la patte de l’ours qui fait sauter le poisson quasi mort hors de l’eau, finies les bobines de fil emmêlés à l’eau (Lolo ?).

Kitty Cat s’est transformé en marché aux poissons, le Rungis de l’Atlantique, le chalutier de Terre Neuve. Tous les bateaux s’arrêtent pour vivre la « criée de Kitty Cat » et déguster les plus beaux spécimens de poissons de l’Atlantique. Bref, on a péché 2 dorades coryphènes… et… et… un marlin qui nous a échappé à la toute fin de la remontée !

A peine les filets levés de la première « Coco », qu’une deuxième mordait déjà à notre leurre baptisé « Champion » ou « Champ’ ». La technique est rodée, la coco dans la cage, le couteau dans les ouïes, et le filet est levé dans la demi-heure ! « Il est pas frais mon poisson ? ». Ainsi Champ nous approvisionna en poisson pour plusieurs jours. 3 jours après, nous remettons Champ à l’eau ; nous l’avions retiré par peur de surpêche. Arthur à la ligne, « Malo, Champ en fait encore des siennes ! Mais cette « coco » est énorme ! Elle plonge, regarde ! »

(je garde le suspens)
(là encore)

Et paf ! Le marlin !! Un beau marlin d’un mètre au bout de Champ’ qui sursaute à chaque remontée de ligne ! Mais malheureusement, et là nos détracteurs se régaleront, le marlin réussit à s’échapper et à retirer son hameçon ! La GoPro n’étant pas sortie, nous n’aurons aucune preuve de cette pêche. Que les choses soient claires, nous n’étions pas sujets aux hallucinations à ce moment là, nous n’étions pas non plus sous l’effet de nos restantes super bocks ou de ce bon vieux diplomatico ! Donc Jérôme quand tu dis « et pourquoi pas une baleine pendant que vous y êtes », c’est injuste ;) !

J’ai essayé de faire assez court sur la pêche…





Le reste de notre nourriture se trouvera dans nos jambons fumés sous vides, quelques boîtes de légumes, des sardinades et quelques Henaff!

Au niveau des activités de jour, nous privilégions le culte du corps. En effet les séances d’entraînement s’enchaînent et ne se ressemblent pas : Gainage, force pure, Peter Mc Calaway, tout ça, tout ça… Sinon un peu de Mario Kart, de lecture n’a jamais fait de mal à personne ! Ca part aussi souvent en sieste dans les bannettes extérieures. La journée passe vraiment vite en fait. A mesure que nous descendons les latitudes, le soleil se cale de plus en plus pour ne briller que 12 heures par jour de 6h à 18h. Mais comme nous ne naviguons qu’à l’heure GMT, cela ressemblait plus à du 9h-21h. Certes nous étions toujours basés sur cette heure, qui se doit d’être l’heure du cahier de bord, nous décalions les shifts de nuit. Les repas étaient eux aussi décalés. C’est d’ailleurs très étrange car aucun calcul n’a dû être fait, notre corps se réglait automatique au décalage horaire que ce soit au niveau du sommeil ou de l’appétit ! Très très pratique !


Après l’incident

16/12/14

Pour continuer ce récit, je vais devoir justement me rapprocher du journal de bord que nous tenons très bien en termes de fréquence mais pas forcément en termes de qualité ! Si l’assurance le choppe, on est choco ! (CPECI) ! Une superbe journée, avec encore la journée Œil en visu ! On prépare la gamelle et on se met « à table » !

Il est alors 22h GMT et d'un coup, le bateau part tout seul très rapidement sur tribord…
« Dis, dis, dis doudou dis donc, tu fais quoi Kitty Cat ? »
Nous remettons le bateau sur sa route, nous appuyons de nouveau sur le bouton du pilote auto, mais le bateau continue à partir et ne garde pas du tout le cap demandé (c’est pourtant pas compliqué on demande du 270° depuis 6 jours…).

La barre est très dure, nous pensons tout d’abord aux drosses de barres qui seraient desserrées mais rien n’y fait. Forcément tout cela arrive de nuit ! Comme d’hab ! Il semblerait qu’il y ait un jeu dans la barre. « Ho non pas la barre, sérieux !! On l’a refaite !! »
On prend notre mal en patience et attendons le lendemain matin pour faire un bon diagnostic et essayer de réparer.

Après avoir barré toute la nuit en se relayant toutes les deux heures, le jour arrive. Nous refaisons tous les checks de la veille. Il semblerait que le pilote 1 sur le secteur de barre ne réponde plus. Problème de vérin ou problème de calculateur, nous n’en savons fichtre rien. Nous essayons le pilote 2 sur la barre à roue, il fonctionne 1 minute et « crack, rrrrrrrrrrrrrr ».

Arthur me regarde, je le regarde, bref on n’a plus de pilote. Nous sommes le 18/12/14 et le verdict tombe :
« Arthur, Malo, veuillez vous avancer s’il vous plaît »
« Oui c’est pour quoi ? »
« Je vous condamne à barrer 24h/24, 7j/7 jusqu’à l’arrivée »
« Euh pourquoi monsieur ? Pourtant on a bossé un peu sur le bateau, c’est pas très très cool quand même ! »
« Haha et ouai les gars, c’est le jeu ! »
« Œil n’est plus assez fort ! Il nous faudrait retourner au Crouesty pour un nouveau mot. »

Et c’est parti pour 10 jours à la barre non stop ! Nous passerons par différents états pendant cette deuxième phase de transat. Nous décidons de continuer des quarts de trois heures pendant la nuit, et deux heures pendant le jour.

Au cours des premiers jours, nous essayons quand même de refaire fonctionner ce pilote de malheur mais cela nous demande pas mal d’effort et ca mine énormément le moral. Dans ce travail d’endurance le plus simple pour résister est d’entrer dans une routine où il ne faut plus se poser de question. Chaque tentative de réparation est vaine et fait beaucoup de mal ! L’humeur à bord est très tendue, non pas l’un contre l’autre, mais contre le bateau ! Nous nous parlons qu’à partir de 15 heures de l’après-midi, le temps d’émerger et de se remettre dans une humeur acceptable. Chaque événement nous rend juste fous !


Il faut savoir que dans cette allure, vent venant de l’arrière, notre bateau est très rouleur. Mettre la table dehors n’est même pas envisageable et chaque gamelle doit être tenue fermement. Imaginez-vous faire la cuisine dans Space-Moutain de très mauvaise humeur !! Hahaha on en rigole tellement maintenant ! Encore un petit exemple, Arthur s’en allant dans sa bannette profonde tout tranquillement qui se prend son petit doigt traînant dans un taquet… Ou moi au réveil d’une bannette technologique qui bascule en avant et met la main en appui direct sur un clou d’une planche de bois retournée… hahahaha






Mais remettons les choses dans l’ordre. Nous avions des conditions de rêve et tout cela s’est très bien passé. Superbe temps, vent entre 15 et 20 nœuds, des moyennes de 140 milles par jour et une transat qui avance très vite ! Pendant nos quarts de nuit, nous nous étions installés une tablette qui nous permettait de regarder des films pendant qu’on barrait ! La petite Olivia Pope n’a plus de secret pour nous. « We will need to come clean on many things afterwards ! »


Nous ne mangerons plus vraiment ensemble et notre réserve de frais s’amenuise de jour en jour. La pêche devient impossible à cause de la présence d’algues sur notre chemin qui intéressent grandement Champion. Nos envies de conserves sont très faibles ! Le cassoulet sous 27 degrés est un sacré challenge, mais nous réussissons à bien manger ! C’est très important !

Je n’ai pas parlé d’eau encore car cela n’aura été à aucun moment un problème à bord. Nous avons fini la transat avec deux cuves sur trois pleines et beaucoup d’eau à boire en bidon ! Très rassurant pour le pacifique.
En revanche, je peux parler d’eau de mer car nous prenons encore de l’eau par les fonds du bateau ! Cette fois c’est sûr cela vient du joint de quille ! Nous vidons encore un seau toutes les 12h !

22/12/14 à 18h37

Mes deuxièmes prénoms ? Jacques, Camille, Jean-Louis, Tony ?, Claudie de la rue Constantinople ?…


Arthur a décidé de se couper les cheveux… de se raser les cheveux pardon. Hahahahaha !

« Malo, tu veux m’aider ? »
« Haha, blague, bien sûr Arthur, je l’ai déjà fait. » Je me revoyais en train de baratiner la propriétaire de la coloc de Marseille. « Je sais très bien couper les cheveux »
« ha bah super » n’en croyant pas un mot.
« C’est comme ça qu’on tient la tondeuse? Le sabot je le mets à 0,5 c’est ça ? »
« Œil ? »

Arthur à la barre, j’attaque le travail ! Le salon est un peu rouleur mais ca va le pire est évité !


Cette barre devient vite le sujet principal de conversation ! Et devient l’objet de nos pires cauchemars !! Chaque nuit est la scène d’évènements para normaux à bord de Kitty Cat ! 2 styles différents :
  • Pour Arthur ce sont les réveils au fond de sa bannette assis en tailleur avec une fausse barre entre les mains… ou encore les réveils où il croit que personne ne se trouve à la barre !

  • De mon côté, il n’y a pas une nuit où je ne me suis pas ramené dans le cockpit extérieur pour demander à Arthur si il avait besoin d’aide… Mais au fur et à mesure, je me réveillais de mon sommeil de plus en plus tôt ! Au début je me réveillais dans les marches puis à la fin j’allumais juste la lumière de ma bannette… Du coup pour calmer un peu le jeu, j’ai mis une feuille de papier m’indiquant la localisation de la barre et les horaires de quart !! Ca a un peu marché quand même !!


Frappés les mecs !

Et pas de répit pour Noel qui se déroule bien entendu en mer où un classique repas Canard s’organise ! Fois gras, Confits, concombre, petits pois ! Et notre cadeau ? Deux bateaux aux alentours qu’on arrive à avoir à la VHF ! Très sympa de pouvoir échanger avec eux ! nous leur demandons un pilote pour noel mais leur réponse fut la même : » Haha non, nous le notre fonctionne très bien ! »… Euh tu veux que je sorte la chignole ?

Mais bon, on n'est pas bien là???















28/12/14

Après 10 jours à la barre, où le poste de barre est amélioré de quart en quart, il nous reste moins de 100 milles à parcourir !! We did it !! Et en avance en plus !! On pourra même se reposer avant le nouvel an et on est sacrément large avant l’arrivée de la famille ! C’est vraiment énorme de voir la terre ! Le rêve, on va pouvoir lâcher la barre pendant plus de trois heures !

L’arrivée est somptueuse. La mer est plate et 15 nœuds de vent nous pousse à 5 nœuds pour rejoindre le port du Marin ! Après avoir évité une quinzaine de coffres à langoustes, nous arrivons dans le cul de sac du Marin. Un petit coup de VHF à la marina nous indique qu’il faut attendre deux heures avant d’arriver au ponton ! Damned !! Mais c’est pas grâve !!! C’est faitttt !! Nous voilà en Martinique pour 2 mois de vacances !!!!!! 










1 commentaire:

  1. Bravo et bonne année! Mais.....il faut surveiller la coque du bateau qui va se transformer en parc à huitres hélas pas de la variété de celles de Cancale qui sont blanches...alors que celles de la Martinique sont noires:))
    Bref n'abusez pas des petits planteurs ni des jeunes beautés locales...quoique... bizzz coquines Fanchon et Jean-François

    PS : votre site est top!!

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Arthur Audran et Malo Le Nel

Adresse:
Kitty Cat - quelque part entre la Rochelle et Auckland

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