Step 14: Transpacifique !!

Bon, autant annoncer tout de suite les couleurs : on a battu tous nos records de vitesse sur cette transpacifique Galapagos-Marquises !




20 jours au lieu de plus de 25 jours prévus c’est plutôt pas mal !


...Enfin c’est ce qu’on pensait lorsque nous nous sommes fièrement engagés dans le port d'Atuona le 6 mai 2015, le torse aussi bombé que les chevilles. Depuis, en discutant avec quelques bateaux voisins on s’est un peu ravisé sur le caractère exceptionnel de notre vitesse de croisière…

Des bruits courent en effet que certains bateaux auraient mis 19, 18 jours et même 16 jours…difficile à croire. Surement de vils ragots de pontons auxquels on ne préfère accorder aucune crédibilité.

Toujours est il qu’on est quand bien content d’être arrivé car pour ne pas vous mentir, même si ça a été bien plus vite que prévu, ça a été un peu long cette histoire !

Après un départ des Galapagos sous haute tension, une traversée d’une zone de pot au noir légèrement humide et usante pour les nerfs, un milieu de parcours à fond les ballons dans une mer croisée particulièrement agitée et un belle fin de parcours 24H/24h à la barre (oui le pilote… encore lui…), nous savourons généreusement notre vie de terrien ici sur la "Terres des Hommes" aux marquises.

Pour les plus courageux d’entre vous voici un petit récit détaillé au jour le jour de cette belle et longue traversée du Pacifique.

Jour 1 – 16/04/15 - Port Vilamil (13h00 Heure Local).

Nous fuyons du mouillage d’Isabella à en faire exploser les soupapes de notre pauvre moteur Perkins.

Toutes les 2 minutes on se retourne. Ok, c’est bon on est pas suivi…

A chaque bateau croisé, la paranoïa revient. Ca y est c’est pour nous… Ils ont changé d’avis, ils viennent saisir le bateau (cf. notre petite escale au Galápagos). Game over.

Non c’est bon c’est juste un bateau de touriste…

Nous voilà donc partis pour la plus grande traversée hauturière de notre vie, le coeur battant la chamade, les muscles tout courbaturés de nos pérégrinations dans la pampa d’Isabella, transpirant à grosse gouttes d’un violent sprint pour tenter d’aller récupérer un peu de nourriture fraiche et il faut bien l’avouer, la frimousse encore bien tiraillée par les cocktails de la veille…

Quant à notre cher Kitty Cat, il se trouve dans un état de bazar et de saleté qui rivaliserait presque avec celui de feu notre coloc’ du 14 rue de Constantinople un mercredi soir…C’est dire…

Et bien évidemment, nous n’avons pas eu le temps durant ces 40h bien remplies de faire les pleins de gazole et d'eau douce… Nous sommes donc presque à court de diesel et partons avec deux cuves d’eau (pour la cuisine et l’hygiène) sur trois.

Bon ca devrait quand le faire. De toute façon on n’a pas le choix !! C’est ça ou la zonzon en Equateur !

Des conditions presque idéales donc pour aborder cette petite croisière de plus de 3 000 nM (environ 5 500 km) à travers l’Océan Pacifique.

Heureusement, pour ce départ précipité, les conditions météos sont avec nous. Il fait grand beau et un bon alizé de SE nous permet de faire route au Sud Ouest vent de travers.

Il est près de 19h (heure local) et l’ile d’Isabella s’estompe doucement dans le crépuscule. On est sauvé ! Personne de raisonnable ne peut tenter de nous rattraper désormais...Quoi que… Non c’est bon : nous voilà partis pour un graaaand voyage Maman !

Jour 2 – 17/04/15

La  première nuit de quart a été compliquée… l’équipage a eu une légère tendance a s’écrouler de sommeil sur la bannette extérieur et le vent en a profité pour faire de même…
Moins de 24h après notre départ, nous nous retrouvons encalminés pendant plus de 3h sous un ciel grisâtre. Les premiers signes de la Zone de Convergence Intertropical (alias Pot au noir) du Pacifique se font sentir.
Et vu qu’on n’a plus beaucoup de gazole, on attend que ça passe !

Hummmm. Quelle douce sensation d’avancer à moins de 4 km/h, le bateau secoué comme un vulgaire pantin dans une mer croisée en sachant qu’il nous reste plus de 2900nM à parcourir !

Mais le vent revient assez vite et nous permet de boucler 111 nM pendant ces premières 24h. Ce qui est bien mais pas top.

Petit rappel de notre échelle de vitesse (un peu révisée pour le pacifique)

Moins de 80nM en 24h : journée Catastrophique
80 à 100nM en 24h : journée Mauvaaaiiise
100 à 120nM en 24h : journée Okkaayyyyy
120 à 140nM en 24h : Bonne journée
140 à 160nM en 24h : journée OUF
> 160 nM en 24h : journée OEIL

Jour 3 – 18/04/15

Le vent se stabilise mais nous avançons contre un courant de 0,5 nœud et on se prend des grains toutes les 20 minutes…
Et toujours cette mer complètement désordonnée qui nous secoue dans tous les sens. On a connu mieux.

116 nM parcourus. Okayyyyy

Jour 4 – 19/04/15

Matinée pluvieuse et après midi ensoleillé. Le vent forcit un peu mais le courant est toujours contre.

Nous avançons SO au bon plein voire au près par moment. L’objectif de ce début de traversée est de faire une route un peu plus SUD que la route directe afin de rejoindre le courant EST OUEST du Pacifique Sud au plus vite (au environ de 4°S/ 5°S) pour pourvoir se sortir de cette charmante zone de pot au noir qui pendant les mois d’avril/ mai peut s’étendre jusqu’au 108 méridien (soit quand même près de 1 800 km d’Est en Ouest a partir des Galápagos)

136 nM parcouru. Ça commence à être de la bonne journée !

Jour 5 – 20/04/15

Ah nous y voilà !!! La journée de l’enfer !

Nous entrons dans le cœur de ce foutu pot au noir. Ciel grisâtre parsemé de nuages noirs menaçants. Sous les nuages, le vent peut attendre 30 nœuds SE pendant 20 minutes puis passer au Nord voire à l’Ouest de 5 nœud à 20 nœuds dans la demi heure qui suit.  

Autant dire que ce genre de conditions est particulièrement agréable de nuit, lorsqu’il faut se lever pour régler les voiles et le cap toutes les 10 minutes pour maintenir une vitesse de 2 à 3 nœud max.

A l’aube, dans un moment de grande solitude nous découvrons sur le GPS que nous reculons à 1 nœud vers les Galápagos… C’en est trop on met le moteur. Et on a de la chance car moins de 3h plus tard le vent se rétablit doucement au SE et nous permet de reprendre une route acceptable.

91 nM parcourus (en partis grâce au moteur !). No comment.

Jour 5 – 21/04/15

Journée «humide » mais le vent est de retour et dans la bonne direction cette fois ci !

De 15h à 3h du matin, c’est la mousson sans interruption avec une visibilité de moins de 200m. C’est l’occasion de vivre à l’intérieur du bateau et de (re)découvrir après plus de 6h de drache ininterrompue, toutes les petites fuites du roof qui perlent à l’intérieur. Home Sweet Home.

Mais on ne se laisse pas abattre et cette pluie nous permet de remplir plus de 15L d’eau dans nos cuves ainsi que de s’offrir une petite douche bien rafraichissante sous la grand voile !

Un seau en 10 minutes !

1ere douche de la traversée, c’est bien légitime !

sympa mais le réglage du thermosta laisse à désirer...

155 nm parcourus – journée OUF on se laisse pas abattre par le mauvais temps !!

Jour 6 – 22/04/15

On sort progressivement de l’énorme grain de la veille. La pluie s’arrête doucement et au lever du soleil une heureuse nouvelle nous attend.

A quelques milliers de kilomètres de là c’est la naissance de la petite Anaé, fille de Gégé et Eloïse que l’on apprend via le téléphone satellite ! Félicitations à vous deux !!

Et ce début de journée est pour nous une renaissance : le ciel à grains de la veille se déchire et laisse s’échapper des wagons de gentils cumulus, signes de beau temps. La mer devient plus régulière et la longue et massive houle du Sud nous berce tendrement.

Ca sent bon ! Cette fois on commence à être sorti d’affaire !

155 nm parcourus - OUF

Jour 7 – 23/04/15


Ca y est le beau temps d’alizé semble s’installer pour de bon. On s’apprête à reprendre les bonnes habitudes. Messieurs, place à la pêche !!!

Malheureusement, cette première tentative se résume par un échec criant. Pas de commentaire. La coryphène fraichement attrapée se décroche et nous laisse sur notre faim…

155 nm parcourus - OUF

Jour 8 – 24/04/15

Ca accélère ! Moins de vagues, vent soutenu on commence à envoyer les chevaux vapeurs ! A bord, ça y est on commence à chiller sévère. Et la pêche est au rendez vous ! Un bon petit poisson au diner ce soir !


155 nm parcourus – OUF (4eme journée à 155, on maintient une moyenne plutôt correct !)

Jour 9 – 25/04/15


Ça accélère encore. On vient de passer le 5ème parallèle et le courant EST OUEST s’emballe. On file à près de 8 nœuds de moyenne sur le fond. A se rythme là on tord la transpac en moins de 20 jours. C’est chaud !! Mais ne nous emballons pas.

Malheureusement cette journée qui s’annonçait si bien va vite se dégrader lorsque nous découvrons avec effroi que notre appât "Champs" (celui qui nous avait offert notre première dorade coryphène) a rejoint le fond de l’Océan sans doute dévoré par un monstre assez puissant pour nous arracher la ligne d’un coup sec…RIP Champs

180 nM parcourus !!!! – ŒIL ŒIL (elle est pour toi cette journée Champs)

Jour 10 – 26/04/15

Bon là, il n’y a pas grand chose a dire. On atteint juste le sommet dans l’histoire de la vitesse à la voile. Cette journée restera dans les annales.

187 nM parcourus !!! RECORD ABSOLU. C’est du grand n’importe quoi. On a même plus de qualification sur notre échelle de vitesse en 24h. Merci au courant qui a du frôler les 2,5 nœuds par moment !!

Jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien…


Jour 11 – 27/04/15



Jusqu’ici tout va bien…jusqu’à ce que dans la nuit du 26 au 27 Avril, en plein visionnage du Film « la Haine », CRAAAAAC !!

Houlà on a du toucher quelque chose… bip bip bip bip bip bip bip bip bip bip bip bip. Ha le pilote vient de décrocher et on a empanné…

Je prend la barre, remet le pilote et bip bip bip… Il décroche de nouveau…

Là ca ne sent pas bon. Après inspection, on découvre que c’est la pièce d’attache du pilote au secteur qui vient de casser net… Après les problèmes électroniques du pilote pendant la transat’ voilà une belle casse mécanique imprévisible.

On ne perd pas encore espoir car nous pouvons remplacer provisoirement la pièce par des boulons moins solides et un peu de mastic epoxy.

Mais en attendant on reprend la barre en continue. Ça faisait longtemps et ça ne nous avait pas trop manqué.

A part ça on est toujours sur un bon rythme !

180 nm parcourus – ŒIL OEIL

Jour 12 – 28/04/15

On barre toute la journée en attendant que le mastic époxy se solidifie autour de l’attache du pilote sur le secteur. On a encore un peu l’espoir de n’avoir à barrer qu’un seul jour.  C’est beau l’espoir.

Le vent se calme un peu mais on maintient toujours une bonne vitesse.

161 nm parcourus – ŒIL de justesse

Jour 13- 29/04/15

Quelques grains viennent nous rafraichir à la barre mais le mastic a séché !
On peut enfin installer la réparation et prier fort qu’elle tienne le plus longtemps possible.

Pour nous remonter un peu le moral, quelques dauphins viennent faire du grand bazar autour du bateau au coucher de soleil. Cela faisait depuis notre départ du Cap vert qu’on n’avait pas vu de dauphins s’approcher aussi près du bateau.














161 nm parcourus – ŒIL de justesse

Jour 14 – 30/04/15


10 000 NM parcourus depuis le départ de la Rochelle en Aout ! On verse une larme devant tous ces milles parcourus et une autre en priant que la réparation tienne car il en reste encore un bon paquet de milles avant d’arriver aux Marquises…

On se réinstalle timidement dans une posture chilly chilly mais on est pas totalement serein non plus… du coup pour se rassurer on essaye de continuer à barrer au maximum pendant la journée pour ne faire travailler le pilote que la nuit.

161 nm parcourus – ŒIL !!

Jour 15 – 01/05/15

C’est la fête du travail. Fêter le travail en congé sans solde au milieu du Pacifique c’est plutôt correct.

Malheureusement pour nous le boulot reprend… Dans la nuit, c’est notre secteur de barre qui a commencé à se fissurer autour de l’attache du pilote. Ça ne sent pas bon… Notre réparation peut encore tenir quelques jours avant de recasser mais il y a plus de jeu qu’avant et les efforts répétés dans cette mer particulièrement agitée risque d’accentuer la fissure…

On ne prend pas le risque de tout casser et de se retrouver à barrer avec une barre de secours impossible à manœuvrer.

Ça nous pendait au nez mais le calvaire de la transat’ va recommencer ! On va finir cette transpac à la barre 24H/24. On s’en réjouit d’avance. Le moral en prend un petit coup quand même.

Jour 16 – 02/05/15

Toujours à la barre… on s’organise comme pour la transatlantique à l’époque : des quarts de 2h la journée et des quarts de 3h la nuit avec l’appui au combien nécessaire d’une bonne série sur la tablette pour nous maintenir éveillés à la barre. Cette fois ci on a opté pour le combo House of Cards & Walking Dead. Et tout s’est bien passé, personne n’a sauté du bateau en faisant des cauchemars de rodeurs.

Jour 17 – 03/05/15

Devinez quoi ? On est toujours à la barre ! Il fait beau, il y a du vent et beaucoup de mer.

La traversée commence à être (un peu) longue. On rêve d’une entrecôte massive avec sauce béarnaise ou roquefort (on est pas trop trop difficile) accompagnée d’une bonne bière fraîche ou d’une quille de rouge…bref : on a envie d’arriver le plus VITE possible.

Malheureusement en descendant vers le sud pour rejoindre les Marquises on s’éloigne progressivement du courant EST Ouest (au plus fort entre le 4 et 6 parallèle) qui nous avait fait exploser le compteur. Résultat, notre vitesse moyenne s’effrite et notre moral avec…

Jour 18 – 04/05/15

On barre, il fait beau, il y a du vent et beaucoup de mer. Quand est ce qu’on arrive ?

Jour 19 – 05/05/15

Haa aujourd’hui c’est la fête ! On barre, il fait super beau, il y a du vent et beaucoup de mer. Quand est ce qu’on arrive ?

Jour 20 – 06/05/15

Enfin ! Dès 3h du matin on aperçoit l’ombre d’Hiva’Oa et au petit matin on passe la pointe Est de l’île sous un arc en ciel de lune.

Quelques heures plus tard nous entrons dans la baie de Tahauku (port d’Atuona) surplombée par la majestueuse montagne Temetiu.

Arrivée en fin de matinée dans la baie d'Atuona sur l'ile d'Hiva Oa

Une petite opération de mouillage sur deux ancres et nous voilà près pour débarquer en Polynésie française après 20 jours de mer et presque 1 mois (moins de 45 h en escale aux Galápagos) passé en mer depuis la sortie du canal le 6 Avril.

Vue du mouillage (ok la photo n'a pas été prise à l'arrivée)


Il est midi, nous sommes morts de faim et de soif (20 jours sans une seule goutte d'alcool s'il vous plait). Encore un dernier petit effort pour rejoindre le village d'Atuona situé à quelques bornes avant de savourer un copieux Chao Men accompagné d'une belle Nano ! 

On va pas gueuler !

heureux
La locale

Et le soir rebelotte ! On envoie un bon bordeaux avec une entrecôte de Nouvelle Zélande à la sauce Roquefort (celle qui nous avait fait saliver pendant toute la transpac) !

4 même pas saoul
moment de recueillement

Bienvenue à Hiva Oa !! 













2 commentaires:

  1. Moyen d'avoir des photos des poulains polynésiens?

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  2. RIP Champs! Il est parti retrouver Alice!!!
    Vous l'avez remplacé? Comment vous allez faire pour choper du pélagique?

    Cette petite barbe de 2 jours te va a merveille Maloche!!!

    Arthur, pas de méduse?

    Bisous a vous 2!

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Nom:
Arthur Audran et Malo Le Nel

Adresse:
Kitty Cat - quelque part entre la Rochelle et Auckland

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